La sécurité au bloc opératoire repose sur l'analyse et l'anticipation des risques, la coordination entre les professionnels et la gestion des ressources humaines. La standardisation de certaines procédures grâce aux check-lists, permet d'optimiser la prise en charge, notamment en diminuant l'importance du facteur humain. Une communication efficace entre professionnels permet aussi de réduire les quiproquos et les retards de prise en charge, et donc la morbi-mortalité périopératoire.
Mme H. est une troisième pare de 45 ans. Dans ses antécédents obstétricaux, on note une césarienne en cours de travail il y a 10 ans à terme pour anomalies du rythme cardiaque fœtal (ARCF) à 6 cm, puis, deux ans plus tard, une deuxième césarienne pour souffrance fœtale avant travail à 36 SA. Les deux enfants sont aujourd'hui en bonne santé. La patiente n'a pas d'autres antécédents médicaux ou chirurgicaux notables.
Pour cette troisième grossesse, elle est suivie par une sage-femme (SF) d'une maternité de niveau 1 : le suivi de grossesse est sans particularités, le fœtus est estimé eutrophe aux échographies. Du fait de l'utérus bicicatriciel, une césarienne est programmée à 38 SA.
La patiente est hospitalisée la veille de l'intervention dans le service de maternité : le monitoring réalisé est normal.
Le lendemain matin, la patiente est prévue pour passer au bloc à 8 h 30 : cependant, l'aide opératoire étant en congés, l'heure de l'intervention est repoussée le temps qu'un autre médecin soit disponible. La patiente commençant à se plaindre de douleurs pelviennes, des antalgiques lui sont donnés par la sage-femme du service ; un monitoring de contrôle n'est pas réalisé.
Deux heures plus tard, la patiente est installée au bloc opératoire ; la sage-femme de salle de naissance est alors appelée pour récupérer le nouveau-né et lui prodiguer les premiers soins. Elle se rend au bloc obstétrical habituellement dédié mais constate qu'il est en travaux ! Elle cherche alors la salle d'intervention au bloc central et arrive finalement à temps pour prendre le nouveau-né en charge. Elle constate alors qu'il n'y a pas de table de réanimation dans le bloc : elle en fait immédiatement la demande. L'enfant est cyanosé, hypotonique et bradycarde, avec un Apgar à 4 à 1 minute de vie.
La sage-femme le stimule en l'essuyant vigoureusement, dans l'attente de la table. L'Apgar est à 5 à 5 minutes de vie ; dans le même temps, l'obstétricien fait la demande de fils appropriés pour terminer la suture, car ils ne sont pas disponibles dans cette salle.
La table de réanimation est installée à 6 minutes de vie du nouveau-né, le pédiatre est alors appelé en renfort. L'enfant est ventilé au masque avec 21% de FiO2, car la table n'a pas eu le temps d'être branchée à l'oxygène, la saturation ne remonte pas (75%).
À 10 minutes, le pédiatre arrive, l'Apgar est à 6, l'enfant est toujours cyanosé et hypotonique : il intube alors l'enfant, puis réalise un massage cardiaque. Une bouteille d'oxygène apportée entre-temps permet d’enrichir l’air inspiré.
L'enfant rosit et se tonifie ; les pH/lactates au cordon reviennent pathologiques (pH 7,05, lactates 12) témoignant de l'anoxie : le SMUR pédiatrique est joint dans l'optique d'un transfert en réanimation néonatale.
Le nouveau-né sera transféré à H1 dans un service adapté et sera placé en hypothermie.
L'évolution à 1 semaine sera favorable.
Une analyse de cet événement indésirable est réalisée à posteriori à l’aide de l’analyse du dossier patient et d’entretiens avec les professionnels impliqués,
La méthode ALARM est retenue.
Conséquences
Cause immédiate
Absence de table de réanimation néonatale au bloc opératoire et retard de prise en charge du nouveau-né.
Causes profondes
Barrières de défense
L’accouchement est caractérisé à la fois par des événements habituels et par des événements inattendus, des complications pour la mère et/ou le nouveau-né pouvant survenir de façon parfois imprévisible. Il est alors essentiel de fournir tout ce qui est nécessaire pour garantir que la mère et le nouveau-né reçoivent les soins les plus sûrs possibles. Les listes de contrôle sont des outils utiles pour organiser ces processus aussi complexes et importants (OMS).
Dans ce cas clinique, plusieurs niveaux de sécurisation de la prise en charge ont été défaillants :
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